Un rapport du Commonwealth alerte sur les conséquences économiques de la nouvelle législation européenne contre la déforestation. L’Afrique subsaharienne, fortement dépendante de l’exportation de matières premières agricoles, pourrait subir d’importantes pertes si elle ne s’adapte pas aux nouvelles exigences.
L’entrée en vigueur du Règlement de l’Union européenne sur la déforestation et la dégradation des forêts (RDUE), prévue pour décembre 2025, pourrait porter un sérieux coup aux économies d’Afrique subsaharienne. Selon un rapport publié le 4 avril 2025 par le Commonwealth, cette législation pourrait entraîner une perte annuelle de 11 milliards de dollars en recettes d’exportation pour la région.
Intitulé « The EU deforestation regulation : trade and investment implications for sub-Saharan African countries », le rapport met en lumière les effets collatéraux potentiels de la loi, qui vise à limiter la contribution de l’UE à la déforestation mondiale. La réglementation impose aux entreprises européennes de s’assurer que des produits comme le cacao, le café, l’huile de palme, le caoutchouc, le bois ou encore le soja ne proviennent pas de terres déboisées, avec une traçabilité totale exigée.
Or, ces produits représentent jusqu’à 25 % du PIB de certains pays africains et jusqu’à 60 % des emplois, particulièrement dans les zones rurales. Sur les 40,15 milliards de dollars générés annuellement par les exportations de ces matières premières et leurs dérivés, 27,4 % sont destinés à l’Union européenne. Sans adaptation, ce sont ces parts de marché – environ 11 milliards de dollars – que la région risque de perdre.
Le cacao apparaît comme le secteur le plus vulnérable. L’UE absorbe 59 % des exportations subsahariennes de cette filière, soit près de 5,93 milliards de dollars par an. Si certaines initiatives de traçabilité et de durabilité ont déjà été lancées – comme au Ghana ou au Nigeria –, les petits producteurs restent les plus exposés. Ils disposent rarement des ressources nécessaires pour répondre aux exigences de certification et de contrôle, ce qui pourrait les exclure du marché européen.
Les conséquences sociales pourraient être lourdes : baisse des revenus, hausse de la pauvreté dans les communautés agricoles, pertes d’emplois, et baisse des recettes en devises pour les États.
Pour atténuer ces risques, le rapport appelle l’Union européenne à soutenir les pays africains en leur fournissant une assistance technique et financière, tout en adaptant ses exigences aux réalités du continent. Il recommande aussi de renforcer les industries locales de transformation, de développer la recherche agricole, de promouvoir des pratiques agricoles durables et de stimuler le commerce intra-africain pour réduire la dépendance au marché européen.
Alors que la lutte contre la déforestation est cruciale pour la planète, elle ne doit pas se faire au détriment des économies vulnérables. Une coopération équilibrée entre l’Europe et l’Afrique apparaît donc essentielle pour allier protection de l’environnement et justice économique.